Fréjus, cause nationale !
Un appel des acteurs de la culture : ne lâchons rien !
Fréjus, ville romaine, ville d’art et de culture. Mais aussi
Fréjus, ville Front National depuis 2014 avec à sa tête le plus jeune sénateur
de France, David Rachline.
Une élue LR d’opposition, Françoise Cauwel, a décidé de
faire de son action politique et locale un exemple de lutte contre les idées et
les actes du FN dans cette ville.
Ne rien lâcher, surtout quand on milite pour les idéaux
républicains dans une région qui affronte depuis de nombreuses décennies un
vote extrémiste ancré et affirmé.
Ne rien lâcher aussi parce que Fréjus, c’est la France, et
que le Front National a clairement
identifié la ville comme un laboratoire de sa politique dans le cadre de
l’élection présidentielle, qui s’annonce à tout point de vue cruciale et
dangereuse. A ce titre, rappelons que David Rachline est devenu à 29 ans le
directeur de campagne de Marine Le Pen.
Françoise Cauwel peut se sentir soutenue par de nombreux
citoyens toujours prompts à s’unir contre les idées du Front National. Mais
elle peut également se sentir quelque peu abandonnée par les institutions et
les partis politiques « classiques » qui semblent tétanisés par l’enjeu
électoral qui arrive et par la perspective défaitiste d’un score extrême
accablant. Françoise Cauwel ne se décourage pas pourtant, et lance depuis
quelques jours un « Manifeste pour Fréjus » qui recueille de
nombreuses signatures et soutiens, de tous bords : http://www.mesopinions.com/petition/art-culture/manifeste-frejus/27124 ou sur manifestepourfrejus@gmail.com. (https://www.facebook.com/manifestepourfrejus/)
Parmi les problèmes abordés dans ce manifeste éclairant, un
thème ressort et fait mal : la culture. En effet, la culture devient un sujet primordial pour le parti de Marine
Le Pen, à un moment où elle n’a vraiment pas l’air d’être la priorité des
partis « traditionnels ». Oui, nous vivons une époque où le Front
National assume un discours sur la culture clair et construit, tristement
terrifiant, et cela doit désormais nous alerter ! N’oublions jamais les
élections régionales de 2016, lorsque Marion-Maréchal avait sonné la charge en
annonçant son combat contre les « bobos
qui font semblant de s’émerveiller devant
deux points rouges sur une toile » et en affirmant son amour pour une
culture qui protégerait « l’histoire pétrifiée » de la région PACA. Ce
discours avait en son temps provoqué une réaction forte du milieu culturel.
Dans cette perspective, Françoise Cauwel nous rappelle que la politique culturelle de la Ville de Fréjus et de son maire sont un avant-goût de ce qui pourrait nous attendre nationalement, avec un affichage de façade culturo-compatible, et des méthodes d’entrismes et d’intimidations beaucoup plus énergiques. Cela passe, entre autre chose, par l’« adoubement » d’acteurs culturels qui acceptent de jouer le jeu de la mairie dans le cadre de cette image culturelle convenable, ainsi que le remplacement d’autres acteurs compétents par des proches selon des méthodes propres à ce parti. Dans le même temps, on pousse à la sortie les artistes bénéficiant depuis longtemps d’ateliers municipaux en leur proposant de nouvelles conventions d’occupation iniques, les obligeant à travailler bénévolement pour les enfants et à occuper les lieux six jours sur sept. La municipalité a affiché sur les ateliers laissés par les artistes contraints à quitter les lieux : « Ici avant un fainéant, aujourd’hui un travailleur », dévoilant si besoin leur véritable mentalité sur la question artistique. Récupération d’événements existants avant l’arrivée du FN pour en revendiquer le succès, et création dans le même temps d’événements propres subventionnés par la mairie, notamment d’un festival international de la pétanque bénéficiant des services culturels. Le plus intéressant n’est donc plus seulement les baisses et refus habituels et effectifs de subvention aux associations ne correspondant pas aux idées de la municipalité, mais aussi la manière dont certains domaines de la culture sont aidés et soutenus, et pour quel motif.
Le manifeste pour Fréjus et le combat de
Françoise Cauwel peuvent servir à notre réveil citoyen. Et nous, « bobos »
de la culture, reconnaissons la justesse de ce combat, qui n’obère pas nos
propres convictions politiques et citoyennes.
La plupart d’entre nous n’ont pas, loin
s’en faut, les mêmes appartenances politiques que Mme Cauwel. Nous soutenons le
« Manifeste pour Fréjus » pour ce qu’il a d’exemplaire et appelons le
plus grand nombre à le signer et le partager.
Nous ne pouvons plus nous contenter des
cris d’orfraie, des lapalissades bien-pensantes et d’une diabolisation d’office
face au danger que représente le Front National et son discours culturel.
Nous devons ainsi saisir cette occasion
pour investir le débat public national et local avec la cause de la culture et
de l’art, à la fois exigeante et impliquée dans la vie de tous.
Ne pas accuser et mépriser
systématiquement l’électeur séduit par le FN mais comprendre, par le biais de
l’Art et de la culture, les raisons de cette séduction pour mieux la combattre
et l’annihiler.
Ne plus laisser le beau mot de
« populaire » être récupéré exclusivement par le populisme.
L’enjeu dépasse très largement la ville
de Fréjus ou le corporatisme culturel.
La Culture, l’Art et l’Éducation sont
indispensables pour affirmer et défendre la force de notre pays, de son
histoire, de sa modernité et de son inventivité. C’est l’image populaire d’une
France faite de tolérance, d’accueil et d’invention face à la propagande d’une
France refermée sur elle-même.
C’est la force d’une France de la
Liberté, de l’Égalité, de la Fraternité. D’une France de Claude Levi-Strauss,
de Colette, de Rabelais, de François Mauriac, d’Aimé Césaire, de Simone de
Beauvoir, de Molière, de Django Reinhardt, de Marc Chagall, autant d’esprits
libres et créateurs parmi tant d’autres connus et anonymes qui ont contribué à
son rayonnement et à son originalité.
C’est aussi son patrimoine, à la fois
historique et créatif, celui qui nous rassemble en une communauté citoyenne
unie et diversifiée. Fréjus est la cause, parmi tant d’autres, de cette France
que nous aimons et défendons. Signer le « manifeste pour Fréjus »,
c’est à terme soutenir ces élus de tous bords, ces militants, ces citoyens qui
luttent jour après jour contre les idées d’exclusion, de xénophobie et d’enfermement.
C’est nous inviter nous même à être actif pour ces « petites » causes
indispensables.
De ces « petites » causes,
faisons les grandes actions.
Signataires :
Dominique Bluzet, comédien, directeur des Théâtres,
Aix-en-Provence, Marseille
Raphaël Imbert, musicien, directeur artistique de la Cie
Nine Spirit, Marseille
Bernard Foccroulle, musicien, directeur
du festival d’Art Lyrique d’Aix-en-Provence
Pascale Boeglin et Charles Berling, co-directeurs du Théâtre
Liberté, Toulon
Patrick Chamoiseau, écrivain
Macha Makeïeff, metteur en scène, plasticienne, directrice
de la Criée, Théâtre Nationale de Marseille
Jean-Guihen Queyras, musicien, président des Rencontres
Musicales de Haute Provence
Patrick Pelloux, médecin et écrivain
Jean-Claude Dreyfus, comédien, écrivain et chanteur
Geneviève Sorin, chorégraphe, Marseille
Johan Farjot, musicien, pianiste et chef d’orchestre
Andréa Ferréol
comédienne
Alain Arnaudet, directeur général de la Friche Belle de Mai,
Marseille
François Morel, comédien, chanteur
Jean-François Bonnel, musicien et enseignant
Olivier Roller, photographe
Ferdinand Richard, co-fondateur de la
Friche Belle de
Mai et président du Fonds Roberto Cimetta
Mai et président du Fonds Roberto Cimetta
Pierre Sauvageot, compositeur, directeur de Lieux publics,
centre national de création en espace public, Marseille
Michel Wieviorka, sociologue
Jean-Pierre Fizet, photographe plateau
Manu Théron, La Compagnie du Lamparo, Cie Nationale des
Musiques des Pays d'Òc
Olivier CORCHIA, administrateur de spectacle, Président du
Pôle des Acteurs de la filière Musicale en Provence-Alpes-Côte d’Azur
François Rossé, compositeur, pianiste
Paul Rondin, directeur délégué du Festival d’Avignon
Patrick Ranchain, directeur du théâtre du Bois de l’Aune,
Aix en Provence
Christian Noorbergen, critique d’art et commissaire
d’exposition
Karl Biscuit directeur artistique Système Castafiore
Béatrice Desgranges, directrice de Marsatac, Marseille
Benjamin
Dupé compositeur et directeur artistique Comme
je l'entends, les productions